Certains dossiers ne devraient jamais franchir le seuil d’un cabinet de coach. Mal engagé, un accompagnement peut empirer les blocages, renforcer la dépendance ou masquer des difficultés qui dépassent largement le cadre du coaching. Ici, la frontière entre soutien et nuisance se brouille, y compris pour les praticiens les plus aguerris.
Éviter de tomber dans ces pièges implique de savoir lire les signaux d’alerte. Reconnaître qu’un coach ne peut pas tout, c’est aussi affirmer la maturité du métier. Savoir dire non, interrompre ou refuser un accompagnement, voilà le vrai professionnalisme.
Plan de l'article
Le coaching n’est pas toujours la réponse : reconnaître les situations limites
Le coaching professionnel n’a rien d’un remède miracle. Certains contextes demandent de poser des limites nettes et d’éviter la confusion avec d’autres formes d’aide. Quand la souffrance psychologique prend le dessus, le coach doit passer le relais. L’écoute ne suffit pas quand il s’agit de troubles qui relèvent d’un psychologue ou d’un psychiatre. Brouiller les rôles, c’est perdre de vue la responsabilité du praticien, au risque de desservir la personne en demande.
En entreprise, la clarté du contrat tripartite, direction, coaché, coach, protège chaque partie. Sans adhésion réelle du bénéficiaire, le coaching tourne à vide. Un manager qui veut “rectifier” un collaborateur à contrecœur, un RH qui impose la démarche : dans ces cas, l’accompagnement devient un simulacre. La confiance, la confidentialité et l’alliance de travail forment la base. Sans elles, la transformation attendue n’a aucune chance de se produire.
Voici les situations à surveiller de près, car elles rendent le coaching inadapté ou inefficace :
- Conflits non résolus : en présence d’un litige aigu non traité, la médiation ou la gestion de conflit doivent intervenir avant le coaching individuel ou collectif.
- Absence de mandat explicite : sans objectif clair ou demande formulée, l’accompagnement part sur de mauvaises bases.
- Demande relevant du conseil ou du mentorat : le coach n’apporte pas de solution toute faite, ni d’expertise technique. Pour cela, il vaut mieux se tourner vers un consultant ou un mentor.
Le manager-coach illustre bien la nécessité de tracer des frontières. Impossible de tout mélanger : quand le pouvoir hiérarchique interfère, la relation se brouille. Plus que jamais, transparence, contrat formalisé et supervision sont indispensables pour éviter les dérapages.
Quels signes montrent qu’il vaut mieux s’abstenir de coacher ?
Repérer les circonstances où le coaching risque de faire plus de mal que de bien requiert une attention de tous les instants. Un coach attentif se pose la question dès le premier entretien : la demande relève-t-elle vraiment du coaching, ou touche-t-elle au domaine du soin psychique ? En présence de souffrance psychologique manifeste, de signes de psychopathologie ou de troubles de la santé mentale, il faut orienter vers un professionnel de santé. Le coaching n’a ni la compétence ni la légitimité pour traiter des troubles cliniques.
D’autres signaux, moins évidents, doivent alerter. Une demande vague, sans objectif précis, une implication forcée : ces contextes rendent l’accompagnement vain. Les bénéfices secondaires, tirer avantage, même inconsciemment, d’une situation problématique, bloquent tout véritable changement. Résistances, procrastination, contradictions : autant d’éléments qui invitent à mettre la démarche en pause.
Un coach professionnel responsable s’interroge aussi sur sa propre légitimité. Manque d’expérience sur la problématique posée, confusion des genres entre coaching et conseil, absence de supervision : autant de failles qui fragilisent la relation et posent des enjeux éthiques. La supervision et le respect d’une charte déontologique sont des garde-fous à ne jamais négliger.
Les situations suivantes justifient une suspension, pour préserver la sécurité du client et la qualité de l’accompagnement :
- Souffrance psychique ou suspicion de trouble clinique
- Demande absente ou engagement insuffisant
- Recherche de solution toute faite, relevant du conseil
- Résistances marquées, bénéfices secondaires non traités
Dans ces cas, arrêter l’accompagnement, c’est protéger tout le monde et respecter la profession.
Erreur fréquentes : quand la pratique du coach devient contre-productive
Le glissement des rôles reste un des pièges les plus courants. Trop de coachs cèdent à la tentation du conseil, de la formation ou même de la thérapie. Cette confusion brouille le contrat de départ et génère des attentes irréalistes, parfois jusqu’à la manipulation. La frontière entre accompagnement professionnel et intervention psychologique doit rester nette, sans ambiguïté.
Quand l’aspect commercial prend le pas sur l’éthique, le danger s’accroît. Promettre monts et merveilles, multiplier les séances inutiles, proposer des offres qui sortent du cadre du coaching : ces pratiques, pointées par la DGCCRF, fragilisent la confiance. Certaines structures, peu regardantes sur la certification ou la supervision, laissent agir des coachs improvisés, sans charte éthique ni cadre déontologique fiable.
L’absence de contrat clair génère aussi son lot de complications. En entreprise, un coaching sans mandat explicite ni objectifs partagés peut aboutir à de la frustration, de l’incompréhension, voire à des conflits ouverts. Sans contrat tripartite ni confidentialité assurée, la confiance disparaît.
Les erreurs les plus courantes à surveiller de près sont les suivantes :
- Déviations déontologiques : manipulation, fausses promesses, absence de supervision
- Mélange des genres avec la thérapie ou le mentorat : la légitimité du coach s’effrite
- Manque de certification reconnue (RNCP, ICF, EMCC) : la qualité et la sécurité sont compromises
Rester vigilant face à ces dérives, c’est préserver la valeur du métier et protéger ceux qui sollicitent un accompagnement.
Prendre du recul : comment affiner son discernement et rester éthique
La supervision occupe une place centrale dans la pratique du coaching. Prendre le temps d’analyser ses interventions, questionner ses repères, croiser les regards : cette démarche collective offre un espace de progression, loin de l’isolement. Reconnaître ses limites, accepter de remettre en question ses pratiques, c’est ce qui distingue un professionnel éthique d’un simple prestataire. Les échanges entre pairs, souvent méconnus, jouent un rôle clé pour affiner son jugement et rester vigilant face aux zones de flou du métier.
Du côté de la formation en coaching, le secteur se structure autour de référentiels solides. Le titre RNCP en France, les accréditations ICF ou EMCC, ou la méthode Une touche de joie de Laurence Cordonnier, apportent des garanties, même si aucune loi n’encadre encore le métier. L’apprentissage ne s’arrête pas au diplôme : il se poursuit dans la formation continue et l’adhésion à une charte éthique exigeante.
La question du cadre reste centrale. Poser des limites claires, refuser les demandes qui sortent du champ du coaching, différencier conseil, mentorat et accompagnement, tout cela s’affine avec l’expérience, et grâce à la supervision. Les organisations professionnelles comme la Société française de coaching ou l’EMCC rappellent que l’engagement déontologique ne se relâche jamais.
Les piliers du discernement éthique
- Supervision régulière
- Formation de qualité, reconnue par la profession
- Adhésion à une charte éthique et déontologique
- Un cadre contractuel défini et transparent
Le coaching, bien exercé, ne s’improvise pas. Refuser certains accompagnements, c’est aussi protéger la portée et la valeur du métier. À long terme, ce sont la lucidité et la rigueur qui dessinent la véritable signature du coach professionnel.


